Goûter du vin au resto sans avoir l’air trop nul

Goûter le vin au restaurant, c’est ce moment gênant où tu dois faire semblant de savoir ce que tu fais pendant que tout le monde attend ton verdict comme si tu étais Bacchus en personne. J’ai une fois senti un verre avec tant d’application que ma narine est tombée dedans le serveur a applaudi, sarcastique. Tu veux éviter ça ? Apprends à jouer la comédie sans trembler, sans renverser, et sans dire que le vin “sent le raisin”. Oui, on va parler vocabulaire, gestuelle, et bluff maîtrisé, parce que trinquer n’a jamais été aussi risqué.
La chorégraphie secrète du goûteur averti

Prise en main du verre : légèreté et assurance
Tout commence par un geste anodin, que le néophyte rate pendant des années : tenir le verre par le pied. Pas le calice, pas la jambe, non, le pied. Pourquoi ? Parce que sinon, vos doigts réchauffent le nectar et adieu la température de service idéale. Et puis, accessoirement, vous avez l'air d'un stagiaire en pleine improvisation. Nombreux sont ceux qui croient s'en sortir avec une prise façon chope de bière. Impossible ! Dans un restaurant suisse un peu chic, ce genre de détail vous classe instantanément dans la catégorie « touriste égaré ». Alors on s'applique. On attrape le pied du verre avec la délicatesse d'un horloger de la Vallée de Joux. Et on essaie de ne pas trembler. Une fois sur deux, ça passe.
Le tourbillon parfait sans inonder la nappe
Faire tourner le vin dans le verre, c'est comme danser la valse avec une inconnue : il faut du rythme, de l'élégance et une bonne dose de bluff. L'amateur apprend à ses dépens qu'un mouvement trop enthousiaste peut se solder par une tache bordeaux sur une nappe blanche. Mention spéciale au serveur qui lance parfois : « Vous préférez une carafe ou une serpillière ? » Le tourbillon discret, poignet souple, sur table reste la meilleure option. Pas de geste ample, pas de drame. Ce n'est pas un concours de centrifugeuse. Et puis, faire tourner le vin permet d'en libérer les arômes, ce qui donne une excuse crédible pour sentir le vin comme si on savait ce qu'on faisait. Même si, dans bien des cas, on cherche surtout à éviter de le renverser sur l'étiquette du vin suisse commandé au hasard.
Inspection visuelle : vanter la robe sans arc-en-ciel
Observer la robe du vin, c'est un peu comme commenter un tableau abstrait : il faut dire quelque chose, même si on ne comprend rien. Beaucoup pensent que « belle robe » suffit. Erreur. Si vous voulez goûter le vin avec élégance, il faut parler de limpidité, de reflets, de densité. Certains tentent des comparaisons hasardeuses comme « on dirait du sirop de cassis filtré par un vitrail » : silence gêné garanti. Mieux vaut rester sobre. Levez le verre à hauteur d'œil, inclinez légèrement, regardez la couleur comme si vous étiez en train de choisir un vin pour un accord mets et vins de gala. Et hochez la tête. L'air de celui qui a lu tout le vocabulaire du vin sur Wikipédia entre deux gorgées de fondue. C'est du théâtre, mais c'est ça, la dégustation de vin au restaurant : une mise en scène où chacun joue son rôle sans ruiner la pièce.
Le grand dictionnaire du « no-faux-pas » : vocabulaire et formules choc

Adjectifs immanquables (et ceux à proscrire)
Lors d'une dégustation de vin au restaurant, qualifier un Chasselas de « sympa » revient à recevoir un regard du serveur comme si vous aviez traité sa grand-mère de meuble Ikea. « sympa » ne fait pas partie du vocabulaire du vin. Ni « cool », ni « pas mal », ni « ça glisse ». En revanche, quelques adjectifs sonnent professionnels sans trop vous engager : « structuré », « ample », « soyeux » (ça marche même si vous ne savez pas ce que ça veut dire). Et si vous tombez sur un vin suisse recommandé par le sommelier, évitez de dire qu'il est « corsé » s'il s'agit d'un blanc léger du Valais. Cette erreur vous vaudra immanquablement un regard désapprobateur.
- À dire : minéral, équilibré, élégant, franc, persistant
- À fuir : acide (sauf si vous êtes chimiste), sucré (sauf si c'est un dessert), « ça pique »
Inventer des notes parfumées sans se faire griller
Le scénario est classique. Vous avez fait tourner le vin dans le verre avec application, vous avez plongé le nez dedans comme si vous flairiez un secret d'État, et là… trou noir. Pas la moindre note de fruits rouges, pas même un soupçon de sous-bois. Pour beaucoup, ça sent simplement « du vin ». Ce qui, paraît-il, est insuffisant. La technique consiste alors à balancer un mot au hasard dans la catégorie « comestible chic » et prier pour que ça passe. « Ah, on sent une touche de mûre confite… » Même si vous n'avez jamais croisé une mûre confite de votre vie. Tant que vous ne dites pas « ça sent le raisin », vous restez dans la course.
Petit bonus : si vous êtes en Suisse et que vous tombez sur un vin élevé en carafe ou en décantation, sortez un classique comme « notes oxydatives » ou « arômes tertiaires ». Personne ne sait ce que ça veut dire, mais tout le monde hoche la tête.
Trois phrases d'accroche pour briller en société
Après plusieurs entrées en matière ratées (du type « Il est bon, non ? »), mieux vaut se constituer un petit kit de survie linguistique. Parce que goûter le vin avec élégance, c'est aussi savoir meubler pendant que les autres font semblant de sentir la truffe blanche. Voici trois phrases fétiches, testées et approuvées à Genève, Lausanne et même dans un bistrot de Sion où le serveur prend parfois au sérieux les amateurs pendant quelques secondes.
- « Il y a une belle tension en bouche, ça s'accorde bien avec le plat. » (Même si vous mangez une fondue.)
- « J'aime la finesse de la robe, on sent qu'il a été travaillé avec précision. » (Utilisable dès que vous observez la robe du vin sans voir à travers.)
- « La température de service est parfaite, ça révèle bien les arômes. » (À dire même si vous n'avez aucune idée de la température idéale.)
Sauver les meubles face à l'étiquette : qui goûte, qui sert, qui recrache

Le goûteur officiel : fonctions et faux amis
Le scénario se répète inlassablement : on tend le verre avec un air solennel au client, comme s'il était un œnologue certifié par la Confédération helvétique. Spoiler : il ne l'est généralement pas. Lors d'une dégustation de vin au restaurant, le goûteur n'est pas celui qui a le palais le plus affûté, mais souvent celui qui a eu le malheur de dire « Je prends un rouge ». Résultat : c'est vous. Félicitations.
Le rôle consiste à valider que le vin n'est pas bouchonné, pas tiède comme une fondue oubliée, et vaguement conforme à l'étiquette du vin suisse péniblement déchiffrée. Pas besoin de disserter sur l'attaque en bouche ou la longueur en finale. Il suffit de ne pas grimacer. Expérience vécue : ça passe 8 fois sur 10.
Comment répondre au sommelier sans hoqueter
Le sommelier, ce ninja du vocabulaire du vin, vous observe. Il vous demande si le vin vous convient. Là, deux options : improviser un avis crédible, ou se transformer en statue de sel. La première fait généralement moins transpirer.
Après avoir choisi un vin suisse dont le nom ressemble à une station de ski, nombreux sont ceux qui bredouillent : « Il a une belle tension en bouche ». Sans savoir ce que cela signifie, mais le sommelier hoche la tête. Voici quelques phrases passe-partout à garder en mémoire :
- « Il est bien ouvert. »
- « Jolie fraîcheur. »
- « On sent bien le fruit. »
Techniques de recrachage (discret ou spectaculaire)
Oui, on peut recracher. Même au restaurant. Même en Suisse. Mais attention : recracher un vin suisse recommandé par le sommelier, c'est comme refuser une bouteille avec un lancer de serviette. Certains tentent le recrachage discret dans une serviette en papier. Résultat fréquent : tache sur la chemise, traumatisme à vie.
Si vous êtes en pleine dégustation avec carafe ou décantation en option, et que vous tenez à votre dignité, voici trois méthodes éprouvées :
- Le faux avalement : faire semblant de goûter le vin avec élégance, puis laisser le liquide disparaître dans une serviette stratégique.
- Le crachoir improvisé : uniquement si vous êtes dans un lieu équipé (spoiler : ce n'est jamais le cas).
- Le sacrifice : avaler, sourire, souffrir en silence. Option recommandée si le vin est tiède, acide ou suspect.
Les gaffes à éviter (et les excuses express)

Bouchon balistique et autres catastrophes
Lors de dégustations de vin au restaurant, certains réussissent l'exploit d'envoyer le bouchon dans l'assiette du voisin. Oui, parfois le même voisin qui vient de choisir un vin en Suisse avec une passion digne d'un œnologue en transe. Si vous ouvrez vous-même la bouteille (ce qui, entre nous, est déjà suspect), gardez à l'esprit que le tire-bouchon n'est pas un instrument de percussion. Et non, ce n'est pas une bonne idée de faire tourner le vin dans le verre avant de l'avoir versé. Les nappes suisses s'en souviennent encore.
« Ça a un goût de raisin ? » : rubrique bêtises
Dire que le vin a un goût de raisin provoque généralement un silence capable de geler le Léman. Pour éviter ce genre de naufrage verbal, mieux vaut éviter de trop improviser avec le vocabulaire du vin. La technique consiste à détourner la conversation vers l'accord mets et vins : « Ce rouge irait bien avec le gibier, non ? » Cela donne l'illusion d'une certaine maîtrise, même si vous venez de confondre la carafe avec un vase à fleurs. Spoiler : ce n'est pas la même chose.
Kit de survie anti-imposteur : bonbons, gargarismes et petits mensonges
Quand on se retrouve perdu entre une température de service du vin approximative et une étiquette de vin suisse illisible (police 6, fond doré, merci l'imprimeur), le mode survie s'active. Un bonbon mentholé avant de goûter le vin avec élégance ? Mauvaise idée. Mais un discret gargarisme à l'eau plate entre deux verres peut sauver votre palais. Et si le sommelier vous demande votre avis et que vous sentez le vide intersidéral, optez pour une formule vague : « Il a une belle structure ». Ça ne veut rien dire, mais ça sonne sérieux. Et surtout, si vous devez refuser une bouteille poliment, faites-le avec un air peiné, comme si vous veniez d'apprendre que Genève n'avait plus de vin blanc. Ça marche à tous les coups.